Compte rendu d’Everglades (2019)
Compte rendu d’Everglades rédigé par Catherine Parayre pour Voix plurielles, la revue de l’Association des Professeur-e-s de Français des Universités et Collèges Canadiens
Lien direct PDF: https://journals.library.brocku.ca/index.php/voixplurielles/article/view/2096/1669
Voix plurielles 15.2 (2018) 259
Dugas, Daniel H. et Valerie LeBlanc. Everglades. Sudbury : Prise de parole, 2018. 181 p.
Sur une invitation de AIRIE (Artists in Residence in Everglades), les artistes
interdisciplinaires Daniel H. Dugas et Valerie LeBlanc partent en 2014 pour le Parc national des
Everglades dans le sud de la Floride. Ils emportent avec eux leur expérience en écriture,
photographie et vidéo ; s’affublent de vêtements les protégeant des moustiques et s’aventurent
dans des marais et marécages sauvages qui gardent pourtant de nombreuses traces de présence
humaine : vieilles voitures, routes défoncées, bâtiments abandonnés et un site militaire hâtivement
installé lors de la crise des missiles en 1962 entre les Etats-Unis et, sur le territoire cubain, l’Union
soviétique, sans compter qu’aujourd’hui le Parc accueille annuellement environ un million de
visiteurs.
C’est dans ce lieu informe et ambigu, où l’eau se mue lentement et abrite une faune
diversifiée, que Dugas et LeBlanc installent leur équipement, observent, documentent et racontent,
produisant tour à tour des vidéopoèmes et des marches sonores. Le somptueux ouvrage Everglades
donne une forme achevée à ce projet de création. Il contient de magnifiques photos, composées et
manipulées de sorte à fondre la fidélité de la reproduction dans l’invention d’environnements
imaginaires. Certaines photos, telle la couverture, évoquent la peinture ; d’autres, la vidéo ; et la
plupart une science-fiction trempée de réalité. Celle-ci est d’ailleurs renforcée par la présence de
photos satellites et d’archives.
En fait, l’intervention humaine constitue le thème commun de ce projet et des textes.
Poèmes en prose, entièrement bilingues, ceux-ci procurent les impressions ressenties dans les
Everglades et témoignent de la peur des animaux – en particulier, de la panthère de Floride
menacée de disparition et, pire, du python birman introduit tardivement et qui prolifère dans les
marécages. Dugas et LeBlanc retracent des marches pendant lesquelles il faut faire attention à ne
pas être blessé, et s’approchent de ruines le long des quelques chemins existants. Leurs textes
rapportent l’expérience des auteurs mais inventent aussi des personnages, par exemple un soldat
venu installer un missile nucléaire durant la Guerre froide. Le recueil est, bien entendu, parcouru
de références aux lieux et à l’implantation humaine, les tenant pour communément connus. Pour
les lectrices et lecteurs, ceci est une aubaine qui les plonge in medias res dans les épaisseurs des
sous-bois et des eaux dormantes, comme si nous étions soumis à un sortilège.
En avant-goût, voici quelques images littéraires sorties du recueil : « Moustiques, mouches
à feu / et papillons de nuit / tombent dans le piège » ; « Nous voilà expert à fracturer le temps / maitre à mesurer le taux de dispersion / la trajectoire de toute chose. » ; « l’alchimie des ruines
provoque une réaction physique si intense qu’une chose profondément enfouie au fond de nous
s’ouvre comme une blessure », ou encore « J’ai vu une ogive nucléaire évidée de sa charge
destructive, placée tel un bibelot à côté du légendaire bouton rouge ». La culture dans laquelle
puisent nos deux auteurs comprend tout aussi bien Henry David Thoreau qu’Andreï Tarkovski
(Stalker) ou Alfred Hitchcock (Psychose). A la fin d’Everglades, les lectrices et lecteurs trouveront
un lien vers les vidéopoèmes et les marches sonores sur lesquels se base l’ouvrage.
Pour nous tous, une aventure immersive.
Catherine Parayre
Compte rendu – Catherine Parayre (2016)
Voix plurielles 13.1 (2016) 168 | 17 mai 2016
Voix plurielles est le journal de l’Association des professeur-e-s de français des Universités et Collèges canadiens (APFUCC).
Dugas, Daniel H. L’esprit du temps / The Spirit of Time. Sudbury : Prise de parole, 2015. 109 p.
Dans sa Théorie des couleurs, Goethe perçoit dans le jaune pur, sans aucune nuance ajoutée, une « sérénité […] doucement passionnante » ; ses effets sont « magnifiques et nobles » (767, ma traduction). Le jaune répand une « impression de chaleur » (769). Pour Wassily Kandinsky, le jaune, « agressif et insistant », perturbe (63). Dans la correspondance de Vincent Van Gogh, le jaune, qu’il soit maussade ou éclatant, se décline en une palette de nuances, et les mots pour les décrire sont aussi magiques que ses tableaux – jaune-vert, jaune d’or, jaune citron, rouge doré, citron pâle, citron soufre, la couleur des champs de blé qui lui font rêver du nord (voir lettre 659). Chez Daniel H. Dugas, le jaune emprunte ses noms à différents nuanciers que l’auteur a consultés dans un café à Sydney en Australie, par exemple « Haleine de lézard », « Rêver la Californie », « Soleil doré », « Pompidou », « Loisir S-H-360 », « Opulence S-H-300 », « Ile au trésor », « Une fin heureuse », « Cheddar fort », « Truffe agitée » et plusieurs autres. La couleur jaune est également nommée dans les poèmes de Dugas : il y a un « homme à la voix d’or » au téléphone qui promet une rencontre à venir ; « les rideaux dorés de Cartier » abaissés chaque nuit (la « joaillerie » y brille « comme des soleils ») ; « un canari / dans une volière », des bijoux qui « dorment inquiets / dans la lumière », une lumière « comme un éboulis » et encore toutes sortes d’éblouissements. Dugas a lu la Théorie des couleurs de Goethe ; mieux encore, il s’en inspire et explique comment. « Projet d’écriture sur la couleur », L’esprit du temps, nous confie son auteur, a été composé à partir de photographies que ce dernier a prises sur son chemin quotidien. Chaque jour, dans son bureau, il ouvre ses nuanciers préférés et choisit deux couleurs qui caractérisent le plus précisément les photos de la matinée ; à partir de celles-ci, il crée un court texte poétique qui reflète le moment imprimé sur l’image. Le recueil égrène ainsi des photos, des noms de couleurs, leur illustration et les textes. Ceux-ci sont bilingues ; Dugas les a traduits en français ou en anglais selon la langue de départ, pour lui qui écrit dans les deux langues, « l’occasion de multiples croisements, de fécondations qui ont contribué à rehausser le texte ou encore à le transformer substantiellement ».
L’esprit du temps, proche du carnet de voyage, du dictionnaire de couleurs, du journal personnel, pratique avant tout la description. Toutefois, celle-ci n’est ni portrait, ni paysage, ni nature morte, mais plutôt documentaire ludique, dépersonnalisé, lui-même nuancier. Collection de photos commentées, il est un album du souvenir et sa poésie du quotidien nous ouvre un monde paisible, contemplateur, immergé dans la vie.
Ouvrages cités
Goethe, Johann Wolfgang von. Theory of Colours. Tr. Charles Lock Eastlake. Londres : Murray, 1840. https://theoryofcolor.org/Theory+of+Colours
Kandinsky, Wassily. On the Spiritual in Art. Dir. Hilla Rebay. New York : The Solomon R. Guggenheim Foundation, 1946.
Van Gogh, Vincent. Vincent van Gogh – The Letters. The Complete Illustrated and Annotated Edition. Dir. Leo Jansen, Hans Luijten et Nienke Bakker. Amsterdam : Van Gogh Museum / Huygens Institute. http://vangoghletters.org/vg/letters.html
Catherine Parayre
Daniel H. Dugas
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